Appareil de topographie électronique

Projet

 

 

 

 

Introduction

La topographie spéléo est une activité laborieuse mais absolument nécessaire et indispensable lors de l'exploration de nouvelles cavités. On peut la décomposer en trois étapes : mesures et prise de notes sous terre, calcul et report des mesures sous la forme d'un plan ou d'une coupe et enfin habillage du dessin à l'aide des notes prises sous terre.

A l'heure ou la topographie spéléo assistée par ordinateur prend son essor (multiplication des logiciels de topographie et de leurs fonctionnalités), la deuxième étape est très largement simplifiée et se fait de façon très rapide, rendant la topographie accessible à tous, même aux personnes complètement réfractaires à la trigonométrie. La troisième étape, même si elle peut être partiellement informatisée, demande toujours une large intervention du topographe pour retranscrire les informations qu'il a collectées sous terre.

La première partie du processus reste la plus laborieuse et celle ou la plus grande rigueur est nécessaire puisque tout le reste en dépend. L'hostilité du milieu, la lenteur de progression et la difficulté d'utilisation des appareils rendent cette activité très rébarbative pour une majorité de spéléologues. Le mode opératoire (utilisation des instruments et prise de notes) est de plus très contraignant si l’on veut éviter au maximum les erreurs toujours possibles. Enfin, la quantité d'informations collectées est limitée par la lenteur du processus.

Cette étape bénéficierait donc largement d'une automatisation qui permettrait non seulement de la rendre beaucoup plus rapide, mais aussi d'éviter les erreurs et d'augmenter la quantité d'informations collectées. Beaucoup de spéléologues verraient alors la topographie d'un autre œil.

Les géomètres utilisent déjà des appareils automatiques qui permettent de collecter les informations qui nous intéressent mais ceux-ci sont complètement hors de portée financière des spéléologues et leur utilisation est à la fois trop compliquée et inadaptée au milieu souterrain.

Certains spéléologues utilisent déjà des appareils électroniques remplaçant avantageusement l'un des trois instruments mécaniques utilisés habituellement (décamètre, compas et clinomètre). Cependant ces appareils électroniques ne prennent qu'une des trois mesures à la fois, et comme ils sont souvent chers et ne résolvent que très peu d'inconvénients liés à ceux qu'ils remplacent, ils sont peu adéquats pour un usage généralisé. Le gain en terme d'efficacité et de réduction des erreurs ne justifie alors pas vraiment l'investissement.

C'est pourquoi nous proposons une approche plus globale de l'automatisation du levé topographique en concevant un appareil intégré permettant de prendre les trois mesures de la visée, de stocker ces informations ainsi que des informations complémentaires pour chaque visée, puis de transférer le tous vers le système chargé de la seconde étape.

Le principe général du levé topo reste identique (progression de station en station) car aucune solution technique n'est satisfaisante pour s'en affranchir.

Le but est de simplifier au maximum la collecte des mesures en évitant le plus de sources d'erreurs possibles, ce qui permet alors aux topographes de se concentrer sur la qualité descriptive des informations collectées par l'intermédiaire de cet appareil et sur le carnet topographique.

Objectif

Le but final est de mettre à la disposition des spéléos un appareil leur permettant de faire de la topographie de la manière la plus efficace et SIMPLE, en évitant au maximum les erreurs possibles et dont le prix reste abordable. Pour chaque visée, il doit pouvoir mesurer la longueur, l'azimut et la pente et enregistré avec ces données les identités des stations de début et de fin de la visée.

Simplicité d'utilisation

Suppression des sources d'erreur

Lors d'un levé topographique avec les instruments traditionnels, les sources d'erreur sont les suivantes :

Un appareil pouvant être utilisé dans n'importe quelle position, enregistrant automatiquement les données issues de capteurs et pouvant ensuite les rediriger vers un logiciel de report topographique n'est pas sujet à ces erreurs, sauf à la première. Seule une identification rigoureuse des stations permet d'éviter celle-ci.

Qualité et diversité des informations collectées

A l'heure actuelle, les topographes notent pour chaque visée les dimensions des galeries au point topo sous la forme de quatre longueurs : Gauche, Droite, Haut et Bas. Ces quatre mesures nous servent habituellement comme une aide au dessin du volume de la galerie, que ce soit sur papier ou à l'écran. C'est le seul système vraiment pratique et compatible avec la méthode actuelle. Il donne cependant une description assez pauvre des galeries topographiées : ces dimensions sont obligatoirement prises sur une section de la galerie, obligatoirement au niveau d'une station topo, elles ne sont qu'au nombre de quatre et souvent approximatives.

Or, avec un appareil comme celui qu'on envisage, à partir d'une station topo, on peut mesurer la position de n'importe quel point et pas seulement celle d’une autre station topo. N'importe quel point, cela veut dire des points de la paroi qui ne sont pas dans le plan de section, pas au niveau d'un point topo, pas "en haut", "en bas" ou "à gauche" et pas limités au nombre de quatre. Cela veut aussi dire des points bien caractéristiques de la morphologie de la galerie et autant qu'on en veut. Autrement dit, chacun peut alors jouer sur le nombre de points de la paroi dont il mesure la position en fonction de la précision descriptive qu'il souhaite.

Pour augmenter cette précision, on peut aussi prendre des mesures vers tout "objet" se trouvant dans la galerie : bloc caractéristique, cascade, concrétion, amarrage, etc.

Description générale

Capteurs et technique de mesure

Parmi toutes les techniques envisageables pour mesurer la longueur, l'azimut et la pente, nous avons retenu celles qui correspondaient le mieux à nos objectifs tout en restant les plus simples possibles à mettre en œuvre avec l'investissement le plus faible.

Mesures angulaires

Les techniques choisies permettent de déterminer l'azimut et la pente en mesurant les composantes des champs de pesanteur et de gravité terrestre selon les axes de l'appareil.

Afin d'exclure toute partie mobile qui aurait rendu l'appareil fragile et beaucoup plus difficile à réaliser mécaniquement, nous avons opté pour un système "6 axes". Celui-ci utilise deux types de capteurs simples : 3 capteurs de champ de gravité (accéléromètres) et 3 capteurs de champ magnétique qui mesurent les composantes de chacun de ces deux champs selon les trois axes de l'espace dans le référentiel de l'appareil. Les premiers permettent de déterminer la position de l'axe de l'appareil par rapport à la verticale (inclinaison et roulis). Cette position combinée avec les données issues des seconds capteurs donne accès à l'azimut de la visée par rapport au nord magnétique.

Outre sa robustesse, ce système permet d'utiliser l'appareil dans toutes les positions sans altération de la précision des mesures. Il ne présente pas d'"angle mort".

Mesure de la longueur

On accède à cette grandeur par l'intermédiaire d'un télémètre laser. C'est en effet la seule technique électronique permettant de mesurer précisément une distance entre deux points car elle utilise un faisceau étroit et non une émission à large ouverture comme avec un système à ultrason ou à infrarouge. De plus elle permet de mesurer des distances à des points hors de portée car elle n'utilise ni réflecteur, ni récepteur séparé. Enfin, c'est la technique la plus précise, car la moins sensible aux variations de conditions atmosphériques (humidité, température, brouillard) pouvant être rencontrées dans différentes cavités.

Deux systèmes sont existent : l’un par triangulation (mesure de l'angle d'incidence sur le récepteur du faisceau réfléchi) pour les distances de 30 cm à 10 m et l’autre par mesure du temps de vol de l’impulsion. L’idéal serait de n’avoir à utilisé que cette technique.

Calcul et mémoire

Les capteurs délivrent un signal dont la tension ou la durée est proportionnelle à la grandeur mesurée. Ces signaux sont dirigés vers un microcontrôleur qui se charge de calculer les grandeurs à mesurer (composantes des champs magnétiques ou de gravitation et distance) à partir de cette tension ou de cette durée. Plusieurs mesures peuvent être faites successivement afin d'obtenir des valeurs moyennes. Il stocke ensuite ces valeurs en mémoire, conjointement avec les données issues de l'interface utilisateur identifiant et décrivant la visée. Le contenu de la mémoire pourra être transféré ultérieurement vers un ordinateur qui recalculera précisément les valeurs angulaires .

Ce calcul étant plutôt compliqué et les capacités des microcontrôleurs assez limitées, il est préférable que l'appareil ne stocke que les données des capteurs et fasse juste un petit calcul simple pour afficher des valeurs approchées des angles.

Par contre, le microcontrôleur devra être utilisé au maximum de ses possibilités pour détecter et résoudre les erreurs possibles en utilisant toutes les fonctionnalités des capteurs et des algorithmes de contrôle.

La mémoire doit être non volatile (elle garde les données même si l'appareil est éteint) et de capacité suffisante pour stocker un nombre plus que confortable de visées.

Une alternative est de n’utiliser le microcontrôleur que pour piloter les capteurs et rediriger les information sur un port série. On peut alors brancher sur celui-ci un appareil bénéficiant de possibilité de programmation, de mémoire, d’affichage et d’interface plus évoluées (PC, Palm Pilot, calculatrice programmable).

De manière générale, on aura intérêt à séparer la partie pilotage des capteur de la partie gestion de l’interface, car celle-ci est susceptible d’évoluer.

Aspect général et interface

L’aspect général de l’appareil doit être compatible avec les objectifs de simplicité de mise en œuvre d’ergonomie et de précision. En particulier le positionnement de l‘appareil sur une station et son alignement avec la visée doit pouvoir se faire de manière simple quelle que soit la position de la station.

Sachant que l’ensemble des composants (capteurs, unité de calcul, interface, batteries) représente un certain poids et un certain volume, une conception monobloc de l’appareil (comme le Disto de Leica) ne semble pas la mieux adaptée : il est difficile de le maintenir dans l’axe de la visée en l’appuyant juste par un coin sur la station.

De plus, dans ce genre de conception, les capteurs magnétiques se trouvent assez proches des batteries ou d’autres éléments qui peuvent les influencer.

C’est pourquoi nous envisageons de construire l’appareil en deux parties :

Un câble blindé relie les deux éléments.

Afin de pouvoir positionner facilement le module de capteurs sur la station et l’aligner sur la visée, il est monté par l’intermédiaire d’une rotule sur un support semi-rigide, tel qu’une plaque de plastique.

L’utilisation devient alors très simple : d’une main on plaque le support sur le rocher avec la rotule sur la station et de l’autre on aligne le module (qui est mobile sur la rotule) avec la visée (le laser doit être allumé). Une fois cet alignement réalisé, la deuxième main est libre pour déclencher la mesure.

Afin de ne pas introduire de décalage angulaire, la fixation du module sur la rotule doit être dans l’axe de la visée.

Cette fixation doit être suffisamment serrée pour que le module reste bien aligné quelle que soit la direction de visée, mais doit aussi lui permettre une rotation douce pour pouvoir l’orienter facilement.

Schéma du module

 

 

L'interface est composée d'un écran et de boutons (ou d'un clavier). Le premier permet de visualiser les mesures et les seconds de saisir les différentes données identifiant les visées.

Située sur le boîtier, elle doit être conçue de manière à être très lisible et à pouvoir appuyer sur les boutons d’une seule main (avec des gants !) tout en maintenant l’appareil. Deux options sont possibles :

Réalisation

Elle fait intervenir quatre type de compétences dont les mises en œuvres ne sont pas indépendantes :

Par contre, les trois fonctions de mesure de l’appareil peuvent être traitées séparément : Le système de mesure de la longueur est complètement indépendant des mesures angulaires et la mesure de l’azimut ne peut s’effectuer qu’après la mesure de la pente et du roulis.

Vue la complexité de l’ensemble, il est souhaitable d’aborder la réalisation en plusieurs étapes, ce qui permettra de simplifier le processus.

La réalisation du télémètre étant une chose assez ardue, il est bon de la laisser de côté au début pour y revenir une fois le système de mesure angulaire bien au point. Etant donnée la baisse actuelle du coût des télémètres laser dans le commerce, peut être sera-t-il alors plus facile d’intégrer un de ceux-ci au système plutôt que d’en concevoir un en entier.

De plus, la mesure de la longueur étant celle qui est la plus facile à réaliser par d’autre moyens sous terre (décamètre, topofil ou télémètre séparé), l’appareil peut être fonctionnel sans télémètre intégré : il suffit d’ajouter la possibilité pour l’opérateur de saisir une longueur pour chaque visée.

Concernant les mesures angulaires, la détermination de l’azimut dépendant de celle des deux autre angles, on simplifiera la réalisation (en particulier au niveau de la programmation du microcontrôleur et au niveau des tests) en commençant par s’intéresser uniquement à la fonction de clinomètre de l’appareil, même si on tient compte dès le départ de la présence des capteurs magnétiques dans la réalisation des pièces mécaniques et des circuit électroniques.

Les trois étapes du projet sont donc :

  1. Réalisation d’un prototype comportant uniquement un clinomètre, un laser de visée et l’interface générale.
  2. Adjonction de la mesure de l’azimut.
  3. Etude du problème du télémètre.

Tableau d'organisation

© Jérôme Ravier, 2000